Au fil de la Laïta : Quimperlé…

La Laïta est un fleuve côtier qui née à la jonction des rivières Ellé et Isole en plein cœur à Quimperlé. En breton « Kimper » se traduit d’ailleurs par « confluent ». Quimperlé est donc littéralement « au confluent de l’Ellé ».

1/ Sur la route des saumons

Sous leurs airs paisibles L’Ellé, l’Isole et la Laïta sont des rivières dont la réputation dépasse largement les frontières françaises. Car ces cours d’eau abritent une des espèces de poisson les plus appréciées des consommateurs et peut-être plus encore des pêcheurs : le saumon.

Quimperlé – Laïta / © M.V.

Xavier Nicolas est né à Quimperlé au bord de la rivière et il ne l’a jamais quittée. C’est ici qu’il a appris à pêcher et à connaître tous les coins et recoins des cours d’eau de Quimperlé. Posté sur le pont fleuri de la ville, Xavier Nicolas nous explique : « C’est là que viennent frayer les poissons. Les lamproies creusent leur nid et pondent puis sont mangées par les truites. Les saumons eux frayent un tout petit peu plus haut. Le jour de l’ouverture de la pêche y’a des pêcheurs du monde entier qui viennent là ! »

Sa passion de la pêche au saumon et sa connaissance du milieu ont amené Xavier Nicolas à prendre des responsabilités au sein de l’APPMA locale (Association de pêche et de protection du milieu Aquatique). Le poste de Président lui a ainsi été confié par les 600 adhérents du Pays de Quimperlé.

Plusieurs fois par jour Xavier Nicolas scrute la surface et les profondeurs de la Laïta. Car les saumons remontent toujours pondre dans la rivière qui les a vus naître et passent en plein centre de Quimperlé.

« Quand il arrive ici le poisson cherche son chemin, soit l’Ellé soit l’Isole. Et nous on le pêche avec la Quimperloise ».

La Quimperloise est un leurre conçu par un Quimperlois tout spécialement pour la pêche au saumon connue de tous les pêcheurs de salmonidés. « Elle a fait le tour du monde en Alaska, en Irlande, en Colombie britannique. Elle est plus connue que tous les Quimperlois » s’amuse Xavier Nicolas.

À force d’observation Xavier Nicolas a appris beaucoup sur le poisson mais pas seulement :« Ils arrivent on ne sait pas pourquoi. Ils ne nous envoient pas de lettre ! Mais y’a des choses qu’on sait : c’est qu’ils sont là deux jours avant la pluie »

Le saumon est toujours bien présent dans la rivière bretonne et ce grâce au travail mené notamment par les pêcheurs pour lutter contre le braconnage et las pollutions. Depuis les années 70 ils font la guerre à tous les pollueurs de leurs cours d’eau. Ils ont ainsi réussi à faire plier les entreprises pollueuses comme la papeterie Mauduit ou une pisciculture qui déversaient leurs eaux usées dans la rivière. Certaines communes également poursuivies en justice ont ainsi mis leurs stations d’épuration aux normes plus rapidement qu’ailleurs.

« Ici vous aviez un estuaire des plus pollués et bientôt il sera parmi les plus propres parce qu’on a lutté contre les pollutions diffuses »

Aujourd’hui 50% des saumons pêchés en France sont bretons.

Les moules de la Laïta

En plus des saumons on trouve aujourd’hui des moules sur la Laïta après 50 ans d’absence. Ces mollusques avaient disparu à cause de la pollution ils sont désormais de retour grâce à Leslie et Julien Romagné les nouveaux mytiliculteurs de la Laïta. Leur première production est encourageante : une moule bien orangée et bien charnue qu’ils vendent sur les marchés du Pouldu, de Clohars-Carnoët et de Moëlan-sur-Mer.

Au fil de la Laïta: Quimperlé, histoire et patrimoine
Histoire, paysages, moules et rencontres autour de la Laïta

2/ Quimperlé, histoire et patrimoine

La cité de Quimperlé voit le jour au XIe siècle au moment de la fondation de l’Abbaye bénédictine de Sainte-Croix par le Comte de Cornouaille. Saint Gurloës, prieur de Saint-Sauveur de Redon, en est le premier abbé.

Concomitamment un port de commerce se développe dans ce fond d’estuaire, lieu de passage de la voie reliant Quimper à Nantes.

L’Abbaye bénédictine de Sainte-Croix / © M.V.

L’histoire méconnue du port de commerce de Quimperlé
« L’Abbaye a développé une activité commerciale, des foires, des marchés et une ville s’est créée autour et un port de commerce aussi. Car pour qu’une abbaye fonctionne il faut du vin pour l’alimentation spirituelle et matérielle » raconte avec un brin de malice Alain Pennec, président de la société d’histoire du Pays de Quimperlé.

Auteur d’un livre sur l’histoire du port de Quimperlé, Alain Pennec complète :
« Le port a fonctionné entre 1050 et 1820. On importait à Quimperlé du vin, du sel pour conserver les viandes, mais aussi du fer d’Espagne. La région elle exportait du grain, de l’avoine, du froment mais aussi du cuir des tanneries de Quimperlé, ainsi que des produits pour les chantiers navals puisqu’on fabriquait des bateaux à Quimperlé ! Brest Landerneau ou même l’île d’Yeu ont commandé des bateaux ici ».

Les bateaux de Quimperlé font jusqu’à 100 tonneaux. Ils vont livrer des marchandises sur toute la côte atlantique et même jusqu’à Madère. L’historien H.Touchard a retrouvé des traces d’un bateau de Quimperlé dans cet archipel portugais en 1480.

A partir du 17eme l’envasement de la Laïta, la concurrence des ports côtiers vont compliquer le fonctionnement du port. Pourtant en 1820 le maire de l’époque comptabilise encore 300 bâtiments.
C’est l’arrivée du train en 1863 qui va sonner le glas du port de commerce de Quimperlé. En 1882 la comptabilité portuaire est arrêtée bien que des sabliers continuent de venir livrer du sable aux agriculteurs du coin.

vue depuis l’abbaye St Maurice / © M.V.

Aujourd’hui certains bâtiments du quai Brizeux ont gardé l’allure des maisons des négociants portuaires. Le rez-de-chaussée voûté servait de lieu de stockage pour les barriques de vin. Le premier étage abritait les appartements des notables. Les 2ème et 3ème étages eux servaient à entreposer le grain.

Au-delà de son port Quimperlé conserve un riche patrimoine et les lieux à visiter sont nombreux : l’Abbatial Sainte-Croix, l’hôpital Fremeur, le Présidial (ancien tribunal), les Halles de 1887 ou encore le Pont-Fleuri, seul accès à la ville fortifiée par l’Est à l’époque moyenâgeuse et sur lequel serait passée une certaine Anne de Bretagne.

Depuis quelques années une façon originale de découvrir le patrimoine de Quimperlé est proposée : une visite en canoé-kayak depuis l’Ellé et la Laïta.

Embarquement immédiat pour Quimperlé.

 

3/ Le site Abbatial de Saint-Maurice

La Bretagne est une terre monastique depuis le très haut moyen âge. Les cisterciens eux s’installent dans la région dès 1130. C’est dans des forêts isolées ou au milieu de terres sauvages que l’ordre installe ses abbayes.

Grange et logis – Abbaye St Maurice / © M.V.

Une abbaye autonome

L’abbaye Notre Dame devenue l’abbaye Saint-Maurice de Carnoët doit son existence au Duc de Bretagne Conan IV qui donna ces terres aux cisterciens. Le charisme de l’abbé de Langonnet, premier abbé de l’abbaye, fera le reste.

Les parcelles cédées se situent au bord de la Laïta à 4 km de l’estuaire et à 12 km en aval de Quimperlé. Un endroit coupé du monde que les moines cisterciens vont totalement aménager afin d‘atteindre une autonomie maximale.

La rivière Ster Nadred qui passe par là est bloquée par deux barrages ce qui crée un étang et permet aux moines blancs d’avoir une réserve d’eau et du poisson. Un moulin installé dans cette même construction leur permet de faire de la farine.

Des terrasses en palier sont aménagées sur les terres. Des jardins, un verger et des bâtiments y sont installés.

Des vestiges encore visibles

Tout près de l’entrée principale de l’Abbaye se trouvent La grange et le logis de l’abbé, réhabilités par le conservatoire du Littoral. A une centaine de mètres en contre-bas trônait l’église abbatiale dont il ne reste aujourd’hui que le fronton et des pans de murs. C’est là que les moines venaient prier et que les fidèles venaient adorer Saint-Maurice.

Le plus bel édifice du cloître abbatial reste la salle capitulaire située au cœur du monastère. Ici les moines se réunissent chaque jour pour organiser le travail, régler les questions disciplinaires, et lire des chapitres de la règle de Saint-Benoit.

Cette salle date du XIIIe siècle. C’est une des plus rares salle capitulaire conservée en bretagne et une des plus belles.

Salle capitulaire – Abbaye St Maurice / © M.V

Les cisterciens ont occupé l’abbaye jusqu’à la Révolution française. Propriété du Conservatoire du littoral, le site est classé Monument historique depuis 1995.

4- Le patrimoine artistique, balnéaire et militaire du Pouldu 

Le Pouldu (Clohars-Carnoët) est une charmante station balnéaire située à l’embouchure de la Laïta. C’est le premier port Finistérien qui fait face à la commune de Guidel (Morbihan). Le Pouldu joui d’une réputation internationale héritée du passage des peintres Paul Gauguin, Sérusier ou De Haan. Mais ce petit port a aussi un riche patrimoine maritime et militaire.

Patrimoine balnéaire
C’est autour de la plage des Grands sables que le patrimoine bâti se concentre. De nombreux hôtels et maisons balnéaires attestent du goût naissant des notables pour les bains de mer dès le milieu du XIXe siècle.
« Dès les années 1850 l’endroit plaît. On est à proximité de Quimperlé et de la Laïta et le site est accessible par bateau. Les gens qui en ont les moyens vont bâtir des maisons ici. Après ces premières villas on va construire les premiers hôtels » explique Maud Naour, médiatrice culturelle à la maison Musée du Pouldu.

Alphonse Marrec, habitant de Quimperlé est le premier à construire un établissement de 60 chambres. Le Pouldu va ainsi compter jusqu’à 7 hôtels en bord de plage.

Patrimoine militaire
Depuis la plage des Grands Sables on aperçoit également à flanc de falaise des fortifications militaires. Sous Louis XIV et Louis XV la côte est aménagée de manière importante mais c’est surtout pendant la deuxième guerre mondiale que les plus grosses batteries sont installées à cet endroit. Un gros arsenal défensif est construit à cet endroit avec un Tobrouk et un poste de tirs reliés par des tranchées.

A quelques encablures de là subsistent aussi une batterie du XVIIe siècle transformé depuis en habitation. Ces batterie de garnison abrita jusqu’à 60 hommes. Son rôle était de protéger l’entrée de la Laïta mais aussi Lorient, un port stratégique à travers les siècles.

A ses côtés se dresse le mât pilote, une sorte de sémaphore à usage civil. « La tour supportait un mât. Tout en haut de ce mât était installée une flèche qui donnait toute sorte d’indications de manœuvres aux bateaux qui approchaient car il y a là des bancs de sables très dangereux » précise Maud Naour.

Le mât Fénoux, du nom de son inventeur, a ainsi permis d’éviter de nombreux naufrages.

Patrimoine artistique

Tombés sous le charme du Pouldu, Gauguin, De Haan ou Sérusier vont séjourner au Pouldu à plusieurs reprises. Paul Gauguin lui viendra ici en 1886, 1888 et 1889.

Ces artistes trouvent dans ce coin du Finistère l’inspiration nécessaire pour peindre des paysages et des scènes de travail du quotidien.

C’est ici qu’en 1888 Paul Gauguin développe le synthétisme. Le Pouldu entre avec lui dans l’histoire de l’art.

Chez Marie Henry

Pendant leurs différents séjours Gauguin mais aussi ses amis Sérusier et de Haan posent leurs valises à la Buvette de la plage. L’établissement géré par Marie Henry, une jeune femme originaire de Moëlan-sur-mer, va être profondément marqué par leur passage.

Des fresques et des peintures réalisées par ces artistes sont en effet découvertes des années plus tard en 1924 à l’occasion de travaux effectués par les nouveaux propriétaires.

Dans la salle à manger une grande fresque signée Meyer de Haan est encadrée par deux peintures de Gauguin : « L’oie » est aujourd’hui conservée au musée des beaux-arts de Quimper. « La jeune bretonne au roué » est quant à elle au musée Van Gogh d’Amsterdam.

La maison musée située à quelques mètres de l’ancienne buvette de la plage reconstitue les lieux tels qu’ils étaient à la fin du XIXe siècle.

Chaque été elle propose des promenades commentées pour découvrir le riche patrimoine du Pouldu.

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