S’il est un sujet sur lequel gouvernement, employeurs et syndicats campent sur leurs positions respectives, c’est celui de l’avenir des contractuels. Les syndicats réclament un nouveau plan de titularisation quand l’État défend toujours l’idée d’un recours élargi au contrat. Ce dernier semble être à l’écoute d’une proposition faite par les employeurs territoriaux : le développement des « contrats de mission ».
Plus de 23 000
C’est le nombre de contractuels qui ont été titularisés par les collectivités entre 2012 et 2016, sur les 40 000 jugés éligibles au dispositif Sauvadet (enquête de la Direction générale des collectivités réalisée en 2017 auprès d’un échantillon de 3 500 collectivités). Sur 2016-2018, 18 000 étaient éligibles. Une enquête « sera conduite ultérieurement » par la Direction générale de l’administration de la fonction publique sur le nombre de titularisés.
Le chantier sur les contractuels, dans le cadre de la concertation pour « refonder le contrat social avec les agents publics », s’est ouvert mardi 15 mai. Près d’un mois et demi d’échanges entre le gouvernement, les employeurs de la fonction publique et les syndicats sont prévus (1).
L’objectif de l’État est d’offrir plus de souplesse aux employeurs publics pour le recours aux contractuels, car cela ne peut s’opérer actuellement que de manière dérogatoire et dans des cas limités définis par le législateur, aurait argumenté le secrétaire d’État en charge de la fonction publique, Olivier Dussopt.
Mais ce dernier a aussi tenu à rassurer employeurs et syndicats : il ne veut pas voir se développer de nouvelles formes de précarité. Bien au contraire, il s’agit selon lui de les résorber. Et ce, en garantissant mieux la « portabilité du CDI » lors de la mobilité des contractuels ou encore en « modernisant » les règles de leurs rémunérations.
Autre enjeu pour le gouvernement : la « professionnalisation du processus de recrutement ». Il le veut exempt de tout risque de discrimination et entouré de nouvelles garanties en termes de transparence, d’objectivité et d’efficacité.
Solidarité entre territoires
Le directeur général du Conseil supérieur de la fonction publique territoriale (CSFPT), Jean-Robert Massimi, qui représentait les employeurs territoriaux ce 15 mai, a confirmé que ces derniers sont en demande de plus de souplesse pour recourir aux contractuels, « mais dans le respect du statut ». Le Conseil sup’ étudie actuellement la pertinence des « contrats de mission », c’est-à-dire « la mise à disposition d’agents d’une collectivité pour une autre se trouvant en pénurie sur certaines compétences, certains domaines particuliers et pour une durée définie liée à un projet déterminé », explique Jean-Robert Massimi.
Les collectivités qui peinent à recruter des cadres sur leurs territoires se disent tout particulièrement intéressées par l’idée. « Cela permettrait de débloquer des situations difficiles sur des besoins parfois basiques », observe Cédric Szabo, directeur de l’Association des maires ruraux de France (AMRF). Celle-ci va à cette fin débuter, avant l’été, une expérimentation d’échanges d’agents urbains/ruraux volontaires avec la métropole du Grand Paris.
Difficile encore pour Cédric Szabo de savoir combien d’agents pourraient se porter volontaires. « C’est de la péréquation technique, de solidarité entre corps de métiers. Cela pourrait intéresser 100 agents une année, 2 000 celle d’après… »
Un cadre à éclaircir
S’il « croit beaucoup au contrat de mission », le directeur de l’AMRF alerte toutefois sur le fait qu’un cadre trop normé conduirait à l’échec d’un tel dispositif.
L’Assemblée des communautés de France (ADCF), pour sa part, considère qu’une loi doit définir une durée maximale pour ces contrats de mission, de six ans par exemple. Elle estime en revanche qu’il n’y a pas lieu de s’inspirer du contrat de chantier mis en place dans le secteur privé en 2017.
L’Association des petites villes de France, qui a publié ce jour un manifeste commun avec France urbaine sur l’avenir de la fonction publique territoriale, se dit quant à elle « prudente ». Le chargé de mission sur ces questions, Matthieu Vasseur, pense que cela serait effectivement un bon levier pour « ventiler les compétences entre les différents échelons de collectivités et au sein de tous les territoires ». « Mais si cela déroge de façon absolue au cadre actuel, nous ne serons pas partants…C’est la position que l’APVF entend défendre en tandem avec France Urbaine auprès de notre ancien président [de l’APVF] Olivier Dussopt. »
De leurs côtés, les syndicats restent dubitatifs. « De notre point de vue, rien ne justifie le développement des contrats de mission », dit Bernadette Groison (FSU). Les neufs syndicats de la fonction publique, qui appellent à la mobilisation ce 22 mai, réclament eux la mise en place expresse d’un nouveau plan de titularisation des contractuels.
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