TRIBUNE – Le mouvement ‘Oser la France’ fondé par le député LR Julien Aubert, appuyé par une quarantaine d’élus (je figure parmi eux – voir liste enfin d’article ), signe dans le JDD un « plaidoyer pour la commune« . C’est « l’un des plus beaux enfants de la Révolution française« , le « premier échelon de la démocratie » et l' »ADN de la France« , écrivent ses auteurs, qui mettent en garde contre son effacement.
C’est le SOS d’une collectivité en détresse : la commune française. Dans une tribune publiée dans le JDD, le mouvement ‘Oser la France’ lancé par le député LR Julien Aubert livre un plaidoyer pour « sauver » la commune française, au nombre de 36.000 sur le territoire national. Ce texte, co-signé par une quarantaine d’autres élus – maires, conseillers locaux, parlementaires -, s’alarme contre « une élite nationale » qui n’aime plus ce qui est, aux yeux de ses auteurs, « le premier échelon de la démocratie » et l’ADN même de la France. Une collectivité qui perd progressivement ses compétences, notamment au profit de l’intercommunalité.
Ci-après le texte de cette tribune :
« Plaidoyer pour la commune »
« Citoyen, tu me connais. Je suis née il y a plusieurs siècles de cela. J’avais alors pour prénom bourg, paroisse ou encore ville. Ce n’est que plus tardivement, il y a deux cents ans, que l’on me baptisa d’un nouveau patronyme emmaillotant mes identités politique, religieuse et fiscale d’autrefois. Présentée au peuple en un seul berceau-frontière censé unifier la plus petite maille de la République, je lui devins familière sous le nom de ‘commune’. Je fus l’un des plus beaux enfants de la Révolution française, avec mon cousin germain, le département.
Mes parrains ont, depuis, disparu. Tandis que là-haut, à Paris, le vent de l’Histoire a soufflé si fort qu’il a déraciné des rois, des empereurs ou des parlements, j’ai survécu. Fort de ses 36.000 communes-racines, l’arbre de la nation a poussé. Grâce à moi, la France est devenue un pays d’engagement local : 1 électeur sur 100 est élu municipal, 1 électeur sur 50 a participé à la dernière élection municipale. Je suis bel et bien le premier échelon de la démocratie, une « petite patrie ». À la fois la TPE et la multinationale, de Rochefourchat à Paris, des communautés humaines de quelques têtes comme de centaines de milliers de personnes, j’ai su avec le temps m’adapter. Ma plus belle réussite reste le maire, ce personnage central de la proximité démocratique, élu préféré des Français.
Je suis une glorieuse spécificité française.
Oui mais voilà, mon élite nationale ne m’aime plus. Je suis devenue, à l’écouter, au fil des années, tantôt trop petite pour être viable, tantôt trop émiettée pour ne pas être dispendieuse. Tant pis si ceux qui me servent ne perçoivent quasiment rien pour la plupart. Moi qui suis l’empreinte des communautés humaines au cours des siècles, qu’avais-je à opposer au raisonnement économique qui assène que, comme dans les entreprises, seuls le gros et le fort l’emportent? Alors, lentement, on a cherché à me noyer en m’accusant de la rage.
Il faut avouer que ma dimension identitaire s’est lentement effilochée. Il y a bien longtemps que mes églises ont fermé. L’État a lui aussi démissionné, résigné au déclin démographique : les postes, les perceptions et les écoles ont suivi. Il y a des communes rurales où les seules maisons qui ouvrent en hiver sont des maisons de services au public et des maisons médicales.
Progressivement, j’ai également perdu ma capacité, héritée de l’Ancien Régime, à lever l’impôt : jusqu’en 2017, 60% de mes recettes de fonctionnement venaient des impôts locaux. La décision du président Macron de supprimer la taxe d’habitation a enlevé un peu plus d’un tiers de cette autonomie. Mes élus perdent un peu plus encore leur responsabilité budgétaire.
En parallèle, j’ai perdu ma dimension politique et symbolique avec le vote des étrangers ressortissants des pays membres de l’UE aux élections locales, qui m’a détachée imperceptiblement du corps des citoyens de la nation, mais aussi avec la suppression du cumul des mandats qui a fait disparaître mes édiles du Parlement. Le principal outil de cette désacralisation a cependant été la création d’intercommunalités, qui ont récupéré peu à peu l’essentiel de mes compétences.
Et puis les intercommunalités ont grandi et enflé démesurément, défiant par la taille les lois de la proximité. Comme l’Union européenne, elles ont été élargies, gavées de compétences et enrichies de fonctionnaires. Après l’âge des intercommunalités est venu l’âge des métropoles, ou plutôt des « monstropoles », ces ensembles urbains déshumanisés, présentés comme les seuls capables de survivre dans le monde darwinien de la compétition économique moderne. Tant pis pour l’homme.
Désormais, mes maires, perdus dans ces nouveaux palais du peuple, deviennent les guichetiers d’une action universelle qui se passe ailleurs, pour le plus grand bénéfice de la technocratie locale. Ils en tirent les conséquences : 1.000 maires depuis 2014 ont jeté l’éponge, et l’effondrement démocratique local s’amplifie.
L’époque a changé : autrefois, on créait des « mairies d’arrondissement » dans les communes devenues trop peuplées, aujourd’hui on préfère transférer « vers le haut » ma substance. À quoi bon lutter contre l’exode rural et les concentrations urbaines quand il suffit de tout transférer à des « pôles de croissance » supracommunaux ? On s’est convaincu à Paris que j’étais de trop sur la photo.
Parfois la muleta laisse apparaître la lame, comme le rapport de 2015 du Commissariat général à l’égalité des territoires préconisant ma fusion en 1.000 entités. Parfois, cette lame taille ma chair : les métropoles m’avalent goulûment comme l’ogre, en dévorant au passage le département. J’étais le monde de la démocratie de proximité, elles sont le monde de la technocratie post démocratique.
Oui, je suis la commune et j’attends que la classe politique joue enfin franc-jeu avec moi : on ne peut pas parler de réduire les strates, renforcer les intercommunalités et me conserver. Il faut choisir. Je suis l’ADN de la France, le plus petit maillon et le plus faible, celui qui permet encore à la démocratie de fonctionner.
Les élites ne m’aiment plus, les technocrates ne m’aiment plus mais je sais que la nation demeure attachée à moi. Il est encore temps de me sauver. »
Par Julien Aubert,
député du Vaucluse,
président d’Oser la France
Cosignataires :
Thibault Bazin, député de Meurthe-et-Moselle, vice-président d’Oser la France
Bernard Brochand, député des Alpes-Maritimes
Jean-François Parigi, député de Seine-et-Marne et vice-président d’Oser la France
Jean-Luc Reitzer, député du Haut-Rhin et vice-président d’Oser la France
Patrice Verchère, député du Rhône et vice-président d’Oser la France
Alain Dufaut, sénateur du Vaucluse
René Danesi, sénateur du Haut-Rhin
Bernard Fournier, sénateur de la Loire
Sébastien Meurant, sénateur du Val-d’Oise
Olivier Paccaud, sénateur de l’Oise
Philippe Pemezec, sénateur des Hauts-de-Seine
René-Paul Savary, sénateur de la Marne
Stéphane de Sallier Dupin, conseiller régional de Bretagne
Thierry Hory, conseiller régional du Grand Est et maire de Marly (59)
Stéphane Sauvageon, conseiller régional de Provence-Alpes-Côte D’Azur
Christiane Pujol, conseillère départementale des Bouches-du-Rhône
Jean-Claude Castel, conseiller départemental des Alpes-de-Haute-Provence et maire de Corbières (04)
Marie-Hélène Herry, maire de Saint-Malo-de-Beignon (56) et conseillère départementale du Morbihan
Stéphane Loth, maire de Talmont-sur-Gironde (17)
Isabelle Robert, maire de Jaillans (26)
Gilles Passuello, maire de Rochefort-Samson (26)
Christian Burle, maire de Peynier (13)
Arnaud Mercier, maire de Venelles (13)
Robert Tchobdrenovitch, maire de Mirabeau (84)
François Henot, maire de Cheminot (57)
Géraud de Sabran-Pontevès, maire d’Ansouis (84)
Monique Barnouin, maire de Sannes (84)
Alain Vercherand, maire de Cellieu (42)
Gérard Moncelon, maire de Néronde (42)
Christian Gratereau, maire de Macqueville (17)
Bernard Goursaud, maire de Brie-sous-Matha (17)
Jérôme Bouletin, maire de Beaumes-de-Venise (84)
Bruno Minutiello, maire de Bénaménil (54)
Dominique Mouginet, maire de Réméréville (54)
Stéphane Lejeune, maire de Sommerviller (54)
David Le Solliec, maire de Gourin (56)
Arnaud Lafon, maire de Castanet-Tolosan (51)
Patrick de Pérignon, maire de Préserville (51)
Jean-Paul Feuillerac, maire de Noé (51)
Michel Belin, maire de Montceaux-lès-Meaux (77)
Jean-Pierre Le Fur, maire de Berné (56)
Dominique Cordier, maire de Bresles (60)
Alexandre Vincendet, maire de Rillieux-la-Pape (69)
Olivier Arsac, adjoint au maire de Toulouse en charge de la sécurité et conseiller métropolitain de Toulouse Métropole
Damien Jeanne, conseiller délégué de Noé (31)
Bernadette Beauvais, adjointe au Maire d’Etrépilly (77), suppléante du député Jean-François Parigi
Pierre Laget, adjoint au maire des 11e et 12e arrondissements de Marseille chargé des finances
Alain Duprat, adjoint au maire de Carry-le-Rouet
Jean-Louis Ghiglione, adjoint au maire de Chatenay-Malabry
Gurval Guiguen, conseiller municipal et métropolitain de Rennes
Jérôme Besnard, conseiller municipal de Mont-Saint-Aignan
Alain Kerhervé, conseiller municipal de Quimperlé
Nicolas Lormel, conseiller municipal de Lamballe.
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